Borne 09
Ecouter
Listen
Le grand panorama
Comment une vallée aussi plate peut-elle séparer ces trois massifs de montagne ? Belledonne, face à nous, point culminant 2 977 m au Grand Pic du même nom, ressemble à la chaîne himalayenne en miniature. Le Vercors, au fond à droite, point culminant 2 341 m au Grand Veymont, est ponctué par le mont Aiguille. Et la Chartreuse, où nous nous situons, avec Chamechaude, son plus haut sommet 2 082 m, qui ne dépasse la dent de Crolles que de 20 petits mètres !
Il faut faire un pas de géant en arrière dans le temps, pour trouver la clef de cette énigme. Remontons jusqu’à la dernière grande période glaciaire, commencée il y a 70 000 ans. Là où nous sommes, nous serions enfoui sous la glace qui recouvre tout. L’immense glacier de l’Isère, venu du cœur des Alpes, se retrouve en effet emprisonné entre les montagnes. Dans sa marche forcée, il creuse la vallée sur des centaines de mètres en dessous de son actuel fond !
Quand la température se réchauffe, il y a environ 25 milliers d’années, alors les glaces vont peu à peu fondre jusqu’à laisser place à un immense lac, qui dit-on, couvrait une surface de 150 km de long, d’Albertville au nord, jusqu’au-delà du verrou de Grenoble, au niveau de Moirans. Au fil des millénaires, la vallée va se combler de dépôts glaciaires et d’alluvions. Jusqu’à devenir cette plate plaine bordée des collines morainiques que nous distinguons bien face à nous. Ce sont à l’origine de gigantesques dépôts de roche transportés par le glacier qui emportait tout sur son passage et abandonnés là lors de son reflux.
Grâce aux limons déposés, la plaine est très fertile. Les historiens rapportent que Louis XII, de passage en Dauphiné lors d’un voyage au tout début du XVIe siècle, qualifia la vallée de l’Isère de « plus beau jardin de la France ».
De nos jours, la rivière Isère chemine bien sagement dans une plaine qu’elle a inondée régulièrement pendant des siècles.
The grand panorama
How can a valley this flat separate three mountain ranges? Belledonne, facing us, with its highest point, the Grand Pic de Belledonne, at 2977 m, looks like a miniature version of the Himalayas. The Vercors, in the background to the right, culminating with the Grand Veymont, at 2341 m, is punctuated by Mont Aiguille; and the Chartreuse, where we are now, with the Chamechaude summit at 2082 m, only 20 meters higher than the Dent de Crolles!
To find the key to the mystery, we need to take a giant step back in time. Back in time to the last major ice age, which began 70,000 years ago. Had we been here then, we would have been buried under the ice which covered everything. The huge Isère glacier, which emerged from the heart of the Alps, found itself imprisoned between the mountains. As it forced its way through, it carved out the valley hundreds of meters below its present floor!
As the temperature warmed up again, about 25 thousand years ago, the ice gradually melted, leaving in its place an immense lake which is said to have covered an area 150 km long, from Albertville in the North, to beyond the Grenoble “lock” (where the Isère gets stuck between the Vercors and Chartreuse), near Moirans. Over the millennia, the valley was filled by glacial and alluvial deposits… until it became the flat plain surrounded by moraine hills that we can clearly see in front of us. They were originally gigantic rock deposits transported by the glacier, which swept along everything in its path, and were abandoned here in the backflow.
The silt deposited here makes the plain very fertile. Historians report that as Louis the Twelfth travelled through the Dauphiné at the start of the 16th century, he described the Isère valley as “France’s most beautiful garden”.
Nowadays, the Isère river makes its way tranquilly through a plain that it has flooded regularly for centuries.